Après-coup et sortie du confinement : les effets psychologiques
Inda Methnani, psychologue clinicienne, a présenté, dans le cadre du groupe d’appui sur la poursuite de l’accompagnement social et professionnel, des éléments permettant de comprendre d’un point de vue psychologique ce qui s’est passé pendant la crise et comment aider les salariés et les personnes en parcours dans leur retour au travail. Cette présentation s’est déroulée sous forme de deux web-conférences accueillant une dizaine de participantes chacune qui ont pu témoigner au travers de temps d’échanges.
Si cette crise est une expérience collective, nous mettant dès lors sur un pied d’égalité, les différences de vécu sont infinies et représentent une double déstabilisation, à l’entrée du confinement, mais aussi à la sortie. En brisant des routines nouvellement créées, cela suscite de l’incertitude. Comment bien accompagner quand nous avons été nous-mêmes bousculés ?
Pendant le confinement, nous avons été privés de trois choses essentielles : notre liberté d’aller et venir, notre espace de vie sociale, notre travail, qui est un espace de vie privée et les possibilités que nous avons à certains moments d’être seuls. Confinement vient du mot « confins » qui a une double acceptation : celle de tracer des limites autour de quelqu'un, de l'enfermer, mais aussi celle d’éloigner, être au frontière de. Cette situation vient donc fragiliser nos liens et fait découvrir de nouvelles modalités relationnelles (visio-conférence, téléphone…). Le cadre de la discussion a volé en éclat, et pour les salariés qui ont pu poursuivre un suivi à distance (généralement sans pouvoir aller beaucoup plus loin qu’une prise de nouvelles), il a fallu se réinventer et il est possible de saisir des choses différentes à travers ces nouvelles modalités de lien.
Quelle est la différence entre le sentiment de solitude et l’isolement ? Isolement et solitude ne sont pas du même registre. La solitude est quelque chose de personnel qui est en lien avec l'autre. On peut se couper de l'autre. Dans l'isolement, il n'y a pas cette connexion à l'autre. Le sentiment d'être seul peut s'accompagnement d'un sentiment d'abandon ou au contraire d'isolement contraint par la volonté d'un autre qui peut être perçu comme méchant.
La crise a renvoyé à l’angoisse de la mort. Certaines personnes ont été paralysées, d'autres ont fait comme si de rien n'était, mais la grande majorité a oscillé entre ces deux mouvements. A ceci, s’ajoute l’effet de la temporalité très particulière entre le confinement et l'accélération de la sortie qui marque dans le corps et le psychisme.
Il est important d’être attentif à la question de la peur. C'est un sentiment rationnel, qu’il faut considérer comme un signal d'alarme où la personne est en prise avec sa propre subjectivité. Cette peur peut être retrouvée dans d'autres sujets. La peur exprimée là va avoir des conséquences dans le lien social avec le travail. Face à cette déstabilisation, la personne qui a des repères personnels fragiles aura encore plus besoin de repères extérieurs solides.
La psychologue recommande d’avoir une attention particulière sur l'accueil et le respect des temporalités des uns et des autres. Il est important de ne pas oublier les personnes qui prennent plus de temps à revenir et de soutenir la dimension d’équipe tout en faisant entendre les différences individuelles dans le vécu. Elle propose de co-construire un cadre de travail avec l’ensemble des salariés en présentiel ou non présents et souligne l’importance d’un management collectif et transparent en ces temps de crise.